Du Mali au Bénin, de l’Afrique de l’Ouest aux Caraïbes, portée par un orchestre flamboyant de cordes, de peaux et de cuivre, la voix d’un génie adolescent explore les routes de la créolité. Pour ce périple panafricain entre soul et blues sahélien, Kala Jula fait peau neuve, abreuvant sa mue aux sources du vaudou autant qu’à celles de la tradition des griots du Mandé.
Dans la tradition des griots mandingues, il n’est pas rare qu’on reconnaisse dans le talent d’un enfant l’héritage direct d’un de ses ancêtres. Ce fut le cas pour Kassé Mady Diabaté, un des plus brillants chanteurs maliens de son temps, en qui les vieux reconnaissaient la voix d’un aïeul fameux. Ça l’est à nouveau aujourd’hui pour son petit-neveu, un adolescent de 16 ans, l’extraordinaire Fama Diabaté. Enfant, sa voix lui valait déjà d’être choisi pour représenter la tradition des griots sur les scènes internationales.
Autour de lui, pour rendre hommage à l’extraordinaire vivacité des traditions musicales d’Afrique de l’ouest, le guitariste Samba Diabaté et le multi-instrumentiste Vincent Zanetti réinventent une nouvelle fois leur ensemble Kala Jula et invitent une des plus formidables fanfares d’Afrique sub-saharienne, le légendaire Gangbé Brass Band. Fondé en 1994 à Cotonou (Bénin), cet orchestre jubilatoire mêle avec génie le jazz aux diverses traditions du Bénin, jetant de lumineux ponts musicaux entre les cultures créoles d’Afrique, des Antilles et de la Nouvelle-Orléans.
« Des blues antiques. Des latineries impeccables. Ce spectacle raconte le dialogue entre des Afriques qui se connaissent peu, des leçons rythmiques, il dit la puissance du jeu, la mémoire des sables foulés. Quand Fama Diabaté chante, la voix qui mue, il a très au fond de la gorge la soul d’Otis Redding qui revient. Plus loin encore, un blues du Delta. Il est universel, comme ce projet, tour de Babel qui, à aucun moment, ne menace de s’effondrer.»
Arnaud Robert, Le Temps, 3 octobre 2019
